Dans la vie, peu de parcours sont aussi transformateurs que celui de devenir parent ou celui de s’engager dans la pratique du yoga.
Bien qu’à première vue ces deux mondes semblent éloignés l’un de l’autre, en y regardant de plus près, je réalise qu’ils partagent de nombreuses similitudes.
Etant moi-même maman de 3 garçons et pratiquante de yoga depuis plusieurs années maintenant, je me rends de plus en plus compte que la parentalité et la pratique du yoga sont, en réalité, deux chemins de quête intérieure d'équilibre, de patience et de résilience.
Un chemin initiatique qui nous aide à découvrir qui nous sommes, mieux nous comprendre et développer notre confiance en nous-mêmes et en nos propres capacités. Tous les ingrédients pour une véritable transformation intérieure.
Comment ces deux rôles se nourrissent-ils mutuellement?
Voici les points communs que j'ai pu constater :
1. La pleine conscience : être présent dans l'instant
Le yoga, dans son essence, est une pratique de pleine conscience, ce n'est plus un secret pour personne. À travers les postures, la respiration et la méditation, l'élève apprend à se recentrer sur le moment présent, à accepter son état physique et mental du moment, sans jugement ni résistance.
Crédit Photo : Gabrielle Scherrer
De la même manière, être parent demande une attention continue à l’instant présent, à être là pour son enfant, même dans les moments de chaos ou de fatigue, surtout dans les moments de chaos et de fatigue!
Les enfants, par leur nature spontanée, vivent entièrement dans le déroulement du moment présent. Ils ne pensent pas à ce qu’ils feront demain - sauf peut-être pour savoir le menu du prochain repas, en tous cas pour les miens :).
Ils ne vivent pas non plus dans les regrets de ce qu'ils ont fait hier.
Pour un parent, se connecter à cette spontanéité est un moyen de pratiquer la pleine conscience au quotidien.
2. Patience et lâcher-prise
Si la pratique du yoga nous enseigne bien une chose, c'est l'art du lâcher-prise.
Certaines postures peuvent être inconfortables, voire frustrantes, mais le pratiquant apprend à s’abandonner à l’expérience, à accepter que certaines choses ne viennent pas immédiatement.
La parentalité, quant à elle, est un véritable défi et exercice de patience. Que ce soit en affrontant les crises de colère, les nuits blanches, les phases de défiance, ou tout simplement les phases d'acquisition de l'autonomie, chaque parent doit apprendre à laisser aller ses attentes et à accepter le rythme de l’enfant.
"Vos enfants ne sont pas vos enfants. Ils sont fils et filles du désir de Vie en lui-même. Ils viennent par vous mais non de vous, et bien qu'ils soient avec vous, ce n'est pas à vous qu'ils appartiennent. Vous pouvez leur donner votre amour mais non vos pensées, car ils ont leurs propres pensées. Vous pouvez loger leur corps mais non leurs âmes, car leurs âmes habitent la demeure de demain, que vous ne pouvez visiter, pas même dans vos rêves. Vous pouvez vous efforcer de leur ressembler, mais n'essayez pas qu'ils vous ressemblent" Gibran Khalil Gibran
On peut essayer de forcer les choses, appliquer des sanctions, chercher à contrôler ce qui se passe avec et pour nos enfants, on peut vite se rendre compte que ce sont bien ces moments qui sont souvent les plus stressants. Mais tout comme dans le yoga, lorsque l’on accepte la situation telle qu'elle se présente, qu'on accepte de lâcher prise, le flux devient plus harmonieux.
3. L'équilibre : sur le tapis et dans la vie
En yoga, l’équilibre est à la fois physique et mental. Certaines postures exigent une grande stabilité corporelle, mais pour les tenir, il faut centrer notre attention, et chercher avant tout à trouver l’équilibre intérieur.
En parallèle, être parent, c'est jongler en permanence entre plusieurs rôles : celui de soignant, d'enseignant, de partenaire, de coach, d'oreille active et pleine d'empathie, de professionnel, et bien plus.
Tendre vers l'équilibre dans toutes ces responsabilités est une quête de tous les jours et chaque jour arrive avec son lot de défis. Tout comme tenir une posture de yoga complexe.
Par exemple, tenir la posture de Bakasana (le corbeau) une fois acquise, peut être facile à tenir aujourd'hui et plus instable le lendemain.
Le yoga nous apprend à respirer à travers les défis, à accepter que l’équilibre est dynamique, parfois précaire, souvent impermanent, mais toujours accessible à travers une pratique régulière. De la même manière, la parentalité nous demande de nous recentrer encore et encore pour rester ancrés malgré les turbulences.
4. La respiration : un appui commun
Dans la pratique du yoga, la respiration est centrale. Elle permet de calmer l’esprit, de détendre le corps et d’apaiser les émotions.
Dans la parentalité, maîtriser sa respiration peut être une véritable clé pour gérer le stress et les moments de tension.
Lorsque votre enfant fait une crise ou que vous vous sentez dépassé, prendre quelques respirations profondes peut vous aider à retrouver votre calme et à répondre de manière plus posée.
Je ne dis pas que c'est facile, loin de là!
Prendre le temps de respirer en pleine montée de crise est extrêmement compliqué voire impossible dans certaines situations. Dans le conflit, on est bien souvent submergé, les émotions à leur pic d'intensité, le corps tendu, la respiration peut-être bloquée ou rapide.
Mais avec la prise de conscience de sa respiration dans ces instants, et en mettant l'intention de placer la respiration comme tampon entre soi, son enfant et ce rapport tendu, on peut améliorer les choses.
Activer une respiration consciente aide à calmer le système nerveux en détournant son attention vers le rythme de la respiration et en ralentissant son corps.
Un exercice pratique et simple qui peut vous aider, c'est la respiration carrée (samavritti pranayama) :
Assis, le dos bien droit, ayez le visage le plus détendu possible, et procédez comme ceci :
Etape 1 Inspiration :
Inspirez par le nez en comptant mentalement jusqu’à 4, en conscience.
Etape 2 Rétention poumons pleins :
Bloquez votre souffle sur un décompte de 4.
Etape 3 Expiration :
Expirez sur 4 temps
Etape 4 Rétention poumons vides :
Retenez votre souffle sur quatre temps. Gardez le visage détendu.
Si vous trouvez compliqué de bloquer le souffle après l'expiration, ignorez cette étape et retournez à l'expiration sur 4 temps.
Vous pouvez ensuite poursuivre sur ce rythme pour au moins 6 cycles ou plus si vous avez du temps.
Avec la pratique régulière, même hors situations de stress, s'appuyer sur sa respiration peut devenir un réflexe et nous aider quand la colère monte. Avec de l'entraînement, on apprend à l'utiliser en amont pour avoir la hauteur et le recul suffisants qui nous éviteront l'implosion!
En intégrant consciemment la respiration dans la routine parentale, il devient plus facile de naviguer à travers les moments difficiles et de se reconnecter à soi-même.
5. La compassion et l’amour inconditionnel
Le yoga prône le développement de la compassion, d’abord envers soi-même, puis envers les autres. Être parent, c’est vivre l'amour inconditionnel, un amour qui dépasse les frustrations du quotidien et les erreurs.
Accepter de faire son maximum sans rien attendre en retour sans attachement au résultat final. Ce résultat qui en définitive ne nous appartient pas.
Mais pour accepter et aimer pleinement son enfant, il est essentiel de s’accepter tels qu'on est d'abord, être tolérant avec nos mauvais jours tout comme on peut être enthousiaste de nos bons jours. C'est un chemin de toute une vie qui ne vient pas sur simple décision du jour au lendemain.
Et le Yoga ne fait pas exception à ce cheminement.
Il enseigne aussi l’acceptation de soi, avec ses limites et ses imperfections.
Cet apprentissage est crucial dans la parentalité, car être parent ne signifie pas être parfait. Il s’agit plutôt de faire de son mieux et d’accueillir ses erreurs comme des opportunités de croissance.
6. Parent et Yogi, des élèves éternels
Que vous soyez parent ou/et yogi, une chose est certaine : il n'y a pas de ligne d'arrivée.
Le parent en tant que guide pour ses enfants vers l'individuation, apprend en réalité chaque jour un peu plus sur lui-même et n'a de cesse d'actualiser, consciemment ou inconsciemment, ses apprentissages scolaires, ses connaissances sur lui même, sa vision des rapports humains, de la famille des amitiés, et sur la vie de manière générale par le filtre du monde qui change et surtout du regard neuf de ses enfants.
Un processus permanent et précieux à la fois, qui apporte un éclairage sur un certain nombre d'aspects de nous mêmes qu'on n'irait jamais visiter de manière spontanée.
Être parent est donc un rôle qui évolue en permanence, tout comme la pratique du yoga. Dans les deux cas, il s'agit d'un voyage qui exige dévouement et constance.
Chaque jour est une nouvelle opportunité d’apprendre et de grandir. Les défis quotidiens sont des opportunités de renforcer sa pratique, que ce soit sur le tapis ou dans la relation avec son enfant. Il n’y a pas de perfection à atteindre, seulement un chemin à suivre.
Pour conclure, je dirai qu'être parent et être yogi sont deux parcours exigeants qui nécessitent patience, amour, et présence. Si la parentalité peut parfois sembler chaotique et imprévisible, adopter un état d’esprit yogique permet de naviguer avec plus de sérénité. En cultivant la pleine présence, en acceptant l’imperfection et en cherchant le lâcher-prise, chaque parent peut trouver, à sa manière, une forme d’harmonie intérieure – pour lui-même et pour ses enfants.
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